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[Roman]-Un Délicat Sourire-[2040006]

Publié le par Serge Raoul

Georges contempla le corps à travers la baie vitrée, comme s'il se trouvait dans un de ces films policiers américains.

L'atmosphère créée par ce spectacle macabre était tout à fait troublante.

Il se dirigea ensuite vers la pièce en empruntant un couloir et y entra.

À peine franchi le seuil, il poussa un — « Nom de Dieu »— dont on ne doit pas trop lui tenir grief, puisque dans toutes les religions, quand des prières adressées au divin demeurent sans réponse, pour se libérer de la souffrance, certains hommes n'hésitent point à profaner. Vous adressez à Dieu par un juron implique en fait que vous êtes fidèle à sa loi.
Un bruit de climatisation ronronnait et berçait la pièce d'une musique sourde et lointaine. La luminosité du lieu mettait en exergue le visage de la jeune fille, qui rayonnait d'un majestueux éclat, composant même une fraîcheur mortuaire, bien plus imposante que celle dont elle jouissait encore au sein des vivants. Elle avait un délicat sourire qui semblait orner sa bouche.  Toutefois, en s'approchant plus près, il remarqua que le corps était étrangement intégral et sa chair paraissait encore douce au toucher. Dans son drap funèbre, la mort la sculptait une dernière fois dans une attitude de plénitude. Elle paraissait dormir d'un sommeil abyssal, alors qu'en fait, il n'en était rien. Avec une tendresse infinie, Georges posa la main sur le front de la défunte comme le font les mères sur le front de leurs enfants pour savoir s'ils ont de la fièvre. Il se baissa et plaqua un baiser sur la joue et sentit le goût de la mort sur ses lèvres.
Dans la voiture qui l'amenait à Figuéras, il s'était imaginé dire des phrases définitives mais rien de tel ne se produisit. Il ferma les yeux et pensa à des moments qui appartenaient maintenant à un passé révolu :  
Jessica souriante sur un cheval, heureuse et joyeuse au volant de la 2CV riant aux éclats avant de passer son permis de conduire, puis ces moments si précieux où ils étaient complices, si rares ces derniers temps, si rares.
Au bout de l'interminable attente, l'âme de Georges se mit à se briser. « Je vais me contenter de rêver de toi, — songea-t-il -- ton existence n’est plus la mienne. » Sans savoir où cela allait le mener...

#RécitMortuaire #Hommage #Deuil #Mémoire #Vie #CérémonieFunéraire #DernierAdieu

[Roman]-Un Délicat Sourire-[2040006]